Mexique  » Politique

Le Mexique à gauche toute !

Amlo fête sa victoire, le 1er juillet 2018 à Mexico. | Pedro Pardo / AFP
Amlo fête sa victoire, le 1er juillet 2018 à Mexico. | Pedro Pardo / AFP

Élu avec 53% des voix, le nouveau président mexicain Andrés Manuel López Obrador rafle aussi la majorité au Parlement. Le raz-de-marée est impressionnant, mais les attentes le sont tout autant.

Cet article a déjà été publié le 4 juillet 2018 sur le site Slate.fr.

 

À celles et ceux qui glosent depuis des mois sur le virage à droite du sous-continent latino-américain, le Mexique vient d’apporter un démenti cinglant.

Le candidat de gauche, Andrès Manuel López Obrador, dit «AMLO», a été élu dimanche 1er juillet avec 53% des voix, soit plus de trente points d’avance sur son principal concurrent, le conservateur Ricardo Anaya.

Une victoire implacable

Cette victoire, certes prévue par les sondages, est totale, implacable et sans précédent. D’abord parce ces élections étaient elles-mêmes sans précédent pour le pays: outre leur président, les quatre-vingt-neuf millions d’électeurs et électrices mexicaines étaient appelées à élire leurs 500 députés et députées et 128 sénateurs et sénatrices, mais aussi huit gouverneurs d’État et près de 1.000 députés et députées de vingt-sept assemblées régionales –un record.

Même si les résultats définitifs ne seront connus qu’en fin de semaine, la coalition d’AMLO –son parti, le Mouvement de régénération nationale (Morena), le Parti du travail (PT) et Rencontre sociale (PES, évangélique)– a également raflé la mise dans bon nombre de scrutins.

Elle devrait ainsi décrocher la majorité absolue à la Chambre basse et la majorité relative au Sénat (une surprise), ainsi que cinq des huit postes de gouverneurs en compétition, dans les États de Veracruz, Morelos, Puebla, Chiapas et Tabasco, dont le nouveau président est issu.

Le raz-de-marée semble aussi concerner les municipales. À Mexico, c’est une des fidèles de López Obrador –et, pour la première fois, une femme, Claudia Sheinbaum, qui gouvernera la capitale, mégapole de vingt millions d’habitants et habitantes.

Claudia Sheinbaum et Andrés Manuel López Obrador à Mexico, le 18 mars 2018 | Omar Torres / AFP

Autre fait historique, la gauche accède à la tête du Mexique pour la première fois depuis les années trente (ère de Lazaro Cardenas), avec une légitimité incontestable. Dans un pays où l’élection présidentielle est à un tour et où, depuis 2000, les présidents successifs ont été élus avec des scores de 35% à 42% (38,2% pour Peña Nieto), les 53% recueillis par la candidature d’AMLO sont eux-mêmes remarquables.

Un programme flou

Que va faire López Obrador de ce leadership et de cette légitimité que lui confèrent son score personnel et sa majorité parlementaire? Pour le moment, tout n’est pas très clair.

Certes, il a promis «de chasser les mafias au pouvoir» et d’éradiquer la corruption et l’impunité, que la population mexicaine ne supporte plus et qui sont selon lui à l’origine de tous les maux du pays.

La corruption a profondément gangrené les partis traditionnels: le PRI, qui a dirigé le pays pendant soixante-dix ans, et le Parti action nationale(PAN, droite) auquel il a cédé le pouvoir en 2000, avant de le retrouver en 2012. PRI et PAN sont renvoyés dos à dos par AMLO, grand gagnant d’une immense vague de dégagisme.

Pourtant, à 64 ans, celui-ci apparaît plus comme un vieux briscard de la politique que comme un champion antisystème. Passé par le PRI (dont la couleur politique a varié de la gauche au centre-droit), puis par le Parti de la révolution démocratique (PRD), parti de gauche sous les couleurs duquel il s’est présenté deux fois en vain à la présidentielle, en 2006 et en 2012, il a aussi été un maire de Mexico plutôt pragmatique au début des années 2000. «Et il vient de réussir son projet de vie, celui d’être président de la République», conclut un observateur.

Pendant la campagne, il a envoyé quelques signaux contradictoires –notamment sur la réforme de l’énergie. Certaines de ses déclarations les plus récentes, annonçant qu’il allait diviser par deux le salaire des hauts fonctionnaires et qu’il n’habiterait pas au Palais présidentiel de Los Pinos, apportent de l’eau au moulin de celles et ceux qui le taxent de populiste.

(…)

                                                 Lire la suite sur Slate .fr