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Après le non au référendum sur la paix, Santos, nobélisé mais fragilisé, doit revoir sa copie

Des partisans du non manifestent avant le référendum en Colombie
Des partisans du non manifestent avant le référendum en Colombie

La victoire surprise,le 2 octobre, du non au référendum sur l’accord de paix contraint le président colombien à retravailler le texte avec les FARC, en y associant davantage son opposition. Pas sûr que le Prix Nobel qu’il a reçu aujourd’hui lui soit très utile dans ce nouveau bras de fer, qu’il n’engage pas en position de force .

 

Alors que les sondages donnaient le oui gagnant, les Colombiens ont rejeté dimanche l’accord de paix avec la guerilla marxiste des FARC. Le président Juan Manuel Santos, qui a misé ses deux mandats sur la paix, essuie donc une lourde défaite. Il a cependant aussitôt annoncé que le cessez-le-feu restait en vigueur et qu’il continuerait à rechercher la paix, annonçant son intention d’inviter toutes les forces politiques, y compris le clan de son adversaire Alvaro Uribe _ ancien président et farouche adversaire de l’accord _ à reprendre le dialogue pour«décider du chemin à suivre».

Le non l’emporte à un cheveu près, avec 50,2% des voix, pour une participation de 37,3% seulement, catastrophiquement faible compte tenu de l’importance de l’enjeu. Ce résultat a surpris le monde entier mais aussi l’exécutif colombien. Même si plusieurs raisons peuvent l’expliquer, à commencer par la réticence de nombreux Colombiens à accorder une quasi-impunité aux leaders des Farc et, surtout, à accepter leur reconversion en politique.

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Certes, ce référendum n’était pas obligatoire et, d’ailleurs, le président Santos a toutes les chances de faire adopter plus tard un nouveau texte par le Parlement. Mais ce «non» le prive d’une légitimité et d’une autorité dont il aurait eu grand besoin pour la très difficile période de post-conflit qui s’ouvrira ensuite, après un demi siècle de guerre civile. Et il n’est pas certain que le Prix Nobel de la Paix qui vient _ malgré tout _ de lui être décerné, lui soit d’une grande aide.

Réformes en stand-by

Pour le moment, l’incertitude prévaut : la Banque mondiale, qui a promis 1,4 milliard de dollars pour financer l’effort de paix ; l’Union européenne qui doit lancer un fonds de près de 600 millions d’euros à cet effet ; Washington, qui doit apporter 400 millions de dollars au plan « Paix Colombie » sur le post-conflit : tout le monde attend.

Il ne faudrait pas que l’incertitude se prolonge trop pour le président Santos, très critiqué pour avoir consacré à la paix toute son énergie depuis son arrivée au pouvoir il y a 6 ans, au détriment de réformes pourtant urgentes, telle la réforme fiscale, jugée nécessaire par beaucoup (même si elle prévoit une très polémique hausse de la TVA).

Car après une décennie faste (3,9% de croissance annuelle en moyenne), l’économie colombienne est aujourd’hui pénalisée par la chute des prix du pétrole. La croissance en 2016 ne devrait pas excéder 2,5%. Bogota espère que le retour à la paix dopera celle-ci à hauteur d’1,1 à 1,9 point de PIB supplémentaire. Cela dit, le post-conflit coûtera fort cher à l’Etat , environ un tiers de son budget selon le Sénat, soit plus de 30 milliards de dollars.